Billet 15 : Catharsis

 Debout 6h00, départ à 7h00, 1h10 de route pour aller à mon rendez-vous endocrinologue.

J'ai tout : bilans sanguins, lettre de la psychiatre à dégainer si besoin, carte vitale, mutuelle, pièce d'identité, courrier de convocation...

J'arrive à la première "ville" à côté de chez moi, opération blocage.
Un type sympa vient me voir, explique qu'ils ralentissent l'accès de 5 minutes, j'explique que je vais au CHU, il me souhaite bon courage, là bas, ça va bloquer.

Ok, je prends la route, à l'approche du prérif, Waze change de route pour esquiver là où ca bloque.
J'arrive avec pas mal d'avance (45min). 
Premier soucis esquivé.

Administration, tout ça, check.

J'attends.

J'attends..

Il a du retard...

Il prend une personne âgée avant moi, sans s'excusé de son retard.

Puis vient mon tour.


On va pas se mentir, c'était violent.


Il remet TOUT en question, même le diagnostic posé par ma psychiatre, invoquant "le phénomène trans".

Il m'interroge, parce que là, nous ne sommes pas dans l'échange.

J'ai l'impression qu'il ne comprend pas ma dysphorie, parce qu'elle n'est pas "classique" ou "clichée".

Il me demande même pourquoi je ne rase pas ma barbe courte si je rejette les caractéristiques secondaires masculins. J'essaie de lui expliqué que je n'aime rien de mon corps, que raser ne change rien à part se faire plus de mal...

Mais je ne peux rien dire, il est là, déroulant un discours, assuré de savoir, de connaître et que toi non. Il ne te demande même pas si tu as étudié la chose, si tu t'es renseigné, échangé avec des assos ou d'autres personnes trans... rien.

Il n'écoute pas. Il s'écoute.

Il enchaine les mots, essaie de te faire flancher pour trouver un argument pour te faire faire marche arrière.

Je suis là, assis en face de lui, je joins mes doigts pour canaliser une colère violente qui monte en moi.

Je ne veux pas être violent, je me convainc que c'est un test, qu'à la fin, tu repars avec ton ordonnance.

Il parle de suicide chez les personnes qui transitionnent, alors que la grande majorité sont dû à la pression sociale et l'entourage. J'ai beau lui avoir parlé de mon entourage, du fait que je passe de homme marié cisgenre à une femme trans homosexuelle et que j'ai bien conscience que c'est le chemin le plus miné mais que cela ne change rien.

Il n'écoute pas. Il s'écoute.

Fin de la rencontre, tu as mal, il te fait une ordonnance pour un test sanguin de 3 choses qui ne sont habituellement pas demandées pour la transition.

Il t'achève : Vous monterez au 6e étage pour refixer un rendez-vous, au moins un mois, et nous verrons si vous voulez toujours faire votre transition.


CONNARD


Je suis partagé entre tristesse et colère. Ne sachant pas quelle émotion laisser sortir. Mon cerveau est embrouillé, la ritaline fait ce qu'elle peut, musique dans les oreilles j'écris, mais mes mots s'emmêlent, mes émotions se mélangent, mon coeur bat, j'ai envie de crier, de casser, de frapper, mais ce n'est pas moi, je ne veux pas que ça soit moi, alors il va falloir canaliser, contraindre, guider, car j'ai peur d'exploser, de perdre le contrôle, d'avoir des regrets, mais si je ne fais rien, j'aurai des regrets, le paradoxe interminable, un ruban de moebius composé de neurones, le bordel, le mal de crâne, la haine, ne pas comprendre ce monde, de moins en moins, de ne pas comprendre les gens, de moins en moins, pourquoi vivre si les gens ne veulent pas que tu vives, abandonner, pourquoi être humaniste quand l'humain ne l'est pas, envie que tout s'arrête, que CA s'arrête, alors le choix :

Arrêter ou changer les choses


Cela fait des semaines qu'une idée grandit dans ma tête.
J'en parle avec mon orthophoniste, elle y voit un besoin urgent, que cela serait une excellente chose.
Alors j'y vais, je vais monter ce projet.
Pour que personne d'autre ne subissent encore ces violences, ce sentiment d'être incompris, de ne pas pouvoir être soi.

Et on va tailler sévère. Vous voulez être cons, vous me connaissez mal.

Je me suis dit en commençant ce blog : Ne mets aucun nom, aucune ville.
Et bien on va déroger à la règle.

A toutes les personnes souhaitant faire une transition, FUYEZ le Professeur Fabrice Bonnet, endocrinologue au CHU de Rennes.



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